LA COULEUR DES SENTIMENTS, film de Tate TAYLOR
Publié le 31 Octobre 2011
Synopsis : Dans la petite ville de Jackson, Mississippi, durant les années 60, trois femmes que tout devait opposer vont nouer une incroyable amitié. Elles sont liées par un projet secret qui les met toutes en danger, l’écriture d’un livre qui remet en cause les conventions sociales les plus sensibles de leur époque. De cette alliance improbable va naître une solidarité extraordinaire. À travers leur engagement, chacune va trouver le courage de bouleverser l’ordre établi, et d’affronter tous les habitants de la ville qui refusent le vent du changement...
Avec Emma Stone, Octavia Spencer, Viola Davis, Jessica Chastain....
D'après le livre éponyme, La couleur des sentiments, best seller de Kathryn Stockett, paru sous le titre original "The Help"
Mon humble avis :Je n'ai pas lu le livre, donc je ne peux me lancer dans une comparaison avec l'oeuvre originale. Par contre, pour une fois, le film me donne fichtrement envie de lire le livre. Alors qu'en général je me dis, "plus la peine de lire le livre, je connais l'histoire". Ce film dure 2h20. Lorsque le générique de fin a assombri l'écran, j'avais l'impression de n'être dans mon confortable fauteuil rouge que depuis une heure. On ne voit pas le temps passer en compagnie de toutes ces femmes d'une autre époque... et pourtant, d'une époque pas si lointaine que ça quand on y pense. Une époque presque contemporaine... Dix ans plus tard ou presque, je naissais... Et c'est ça qui fait froid dans le dos, pas ma naissance (quoique), mais que ces injustices et ce racisme primaire soient si proches de nous historiquement parlant et qu'ils n'aient certainement pas encore complètement disparu de l'esprit de tous... Le racisme était alors légal...et s'appelait le ségrégationnisme. Ne pas l'être pouvait vous mener en prison, ou en tout cas, en gros problème avec la loi et la "justice"
En regardant ce film, j'ai pensé à la chanson de JJ. Goldman "Et si j'étais né en 17 à "Leischentat"... Bref, comment aurais-été si j'étais née à cette époque. J'ose croire que j'aurais été du bon côté, celui des révoltés, des indignés, celui des en colère, des dégoûtés... Puisque c'est ainsi que je suis, même si je l'avoue, ma révolte et mes indignations sont souvent passives et ne dépassent pas une conversation ou quelques écrits sur ce blog...
Ce film parle de la révoltante condition des femmes noires américaines qui étaient "bonnes et nourrices chez les riches". Aucun droit social, aucun respect ni reconnaissance de la part de leurs employeurs, une exploitation pour un salaire de misère, une humiliation et un racisme délirants et le Ku Klux Klan qui n'est jamais loin. C'était encore l'époque où des lieux étaient interdit aux Hommes de couleurs... La couleur des sentiments donnent la parole à ces femmes.
Ce film est magistralement réalisé et interprété. Pas de manichéisme forcé, puisque par quelques personnages exemplaires mais hélas rares, le film montre bien que tout le monde n'était pas à mettre dans le même panier. Il y avait tout de même des gens qui s'interrogeait sur ce que le monde leur imposait comme système de pensée, d'autres qui ne se posent pas de questions car blanc ou noir, où est la différence ! Hélas, ces personnages sont minoritaires face à ses mégères détestables du Mississippi d'alors. Le sujet est grave mais heureusement, certaines situations permettent des rires sincères qui ne sont pas déplacés. L'humour est présent donc nous ne sommes pas dans un mélo de 2h20 faisant sans cesse appel aux bons sentiments. Non, loin de là ! Et puis il y a les regards malicieux de l'une devant l'inquiétude de l'autre.
Lorsque je parcours les critiques presses, je suis surprise de leur enthousiasme si frileux et surtout, je suis choquée... La plupart d'entre elles encense les actrices... blanches et oublie souvent les véritables héroïnes de ce film, les actrices noires qui donnent toutes les dimensions du film, leurs tripes, leur histoire, leur âme... Peu de ces critiques semblent avoir retenu les noms d'Octavia Spencer et de Viola Davis, entre autre. Il semble qu'au niveau reconnaissance à talent égal, le monde du journalisme rechigne encore à traiter les acteurs de couleurs avec la même admiration que leurs collègues blanches... Il y a encore du chemin à parcourir il me semble. Un président noir à la tête des Etats-Unis d'Amérique, environ 50 après l'époque de ce film est déjà une sacrée victoire, mais la route n'est pas terminée.
En attendant, ce film est à voir. C'est encore un film intense, riche, nécessaire, qui sait émouvoir (hou les yeux rouges des copines !) et amuser aussi. Un film qui révolte mais qui fait passer un grand moment de cinéma. Chapeau !