UN HIVER A PARIS, de Jean-Philippe BLONDEL

Publié le 6 Mars 2015

Roman - Editions Buchet Chastel - 288 pages - 15 €

 

Parution le 1er janvier 2015

 

L'histoire : Victor, jeune bachelier provincial, débarque à Paris où il est admis dans une grande classe préparatoire d'hypokhâgne. Sa première année se déroule dans un désert relationnel, tant il est invisible aux yeux des autres étudiants. La deuxième année, arrive Matthieu, à priori aussi peu à sa place que Victor dans cette prépa. Les deux garçons lient connaissance en partageant quelques clopes dans la cours. Quelques jours plus tard, Matthieu se suicide à l'intérieur de l'école. Tout le monde entend le cris, puis le bruit de la chute. Ami supposé de la victime aux yeux de tous, Victor n'est alors plus transparent...

 

 

Tentation : Mes précedentes lectures de l'auteur.

Fournisseur : Dominique, merci pour le prêt !

 

 

Mon humble avis : Comme les autres oeuvres de Jean-Philippe Blondel, Un hiver à Paris prend racine dans un événement autobiographique. Ce suicide a eu lieu alors que l'auteur était lui même étudiant dans cette prépa. La réalité occupe donc quelques pages dans le livre. Elle est brute, métallique, rapide, sans appel. Le reste, c'est le talent de Jean-Philippe Blondel qui nous plonge dans un destin en pleine construction, entre certitudes, étonnements, découvertes, remises en question et décisions.... dans un monde de requin, dans un monde où votre naissance est sensée tracer votre vie. Et déroger à cette vie tracée, c'est un peu quitter son monde, s'en écarter par différences, malgré l'amour.

Jean-Philippe Blondel évoque ici, avec grand tact, délicatesse, justesse, émotions (mais émotions point dégoulinantes) le grand écart qui sépare les provinciaux de la vie parisienne. De cet écart, va naitre la solitude de Victor. Il n'est pas né "dedans", alors on ne le voit pas, on l'ignore. Le milieu populaire dont il est issu le prive de popularité dans cette micro société dont il ne possède pas les codes. Il est transparent aux yeux des autres. Ce thème de la transparance aux yeux des autres m'a beaucoup touchée, me rappelant sans doute de douloureux souvenirs. A l'école, j'étais celle qu'on choisissait en dernier pour composer une équipe de sport. J'étais celle dont on ne se souvenait pas. De là vient peut-être mon réflexe de pitrerie qui fait que bien souvent, et hélas, maintenant, on ne voit que moi, on n'entend que moi trop souvent, sans que je ne puisse lutter contre cette image déformée que j'offre de moi.

Enfin bref, revenons en au roman, qui dénonce la brutalité et la concurrence imptoyable que l'on trouve dans ces grandes écoles de prépa. Cette concurrence est parfois bien plus entretenue par les profs que par les élèves eux mêmes... pas préparés, à la sortie de l'adolescence, à l'âge où l'avenir se joue, à se battre contre ça. Le comportement de certains profs qui s'acharnent à humilier les élèves, à les enfoncer plus bas que terre est bien montré ici... tout comme les conséquences que cela peut avoir. Mais attention, il y a dans ces pages beaucoup de nuance et aucun manichéisme.

Le suicide. Celui ci était en 1984... mais tous les ans, il y en a d'autres, dans le même établissement ou dans des collèges et lycées. Parce qu'il manque une main tendue, une parole, un regard, un "je te vois, je connais, je partage". Chacun s'interroge sur le pourquoi de l'acte, parfois par des réflexions toutes faites, mais peu se penchent sur le "comment éviter cela".

Enfin, il y a le "reste" du roman... Le vie de Victor qui, suite à ce suicide, prend un tournant inattendu. Parce qu'il a fumé quelques clopes avec Matthieu, chacun en déduit qu'ils étaient amis. Victor devient alors victime, victime de la victime, tout le monde le voit, l'approche, lui parle, cherche son amitié. Le succès soudain de Victor est lié à un malentendu. Et malgré lui, Victor va profiter de ce malentendu et deviendra l'absent des autres : le frère qui a fui, le fils décédé etc... lors de rencontres et de relations très touchantes.

C'est un roman magnifique, servi par un style efficace, des phrases courtes et sans fioritures, un roman dont j'ai du mal a parler alors mieux vaut que vous le lisiez vous même, certainement d'une traite !

 

Comme j'ai eu la chance d'assister à une rencontre littéraire avec Jean-Philippe Blondel ce mercredi, j'ai repris ma petite collection de photos "d'effets de mains d'auteurs" !

Comme j'ai eu la chance d'assister à une rencontre littéraire avec Jean-Philippe Blondel ce mercredi, j'ai repris ma petite collection de photos "d'effets de mains d'auteurs" !

UN HIVER A PARIS, de Jean-Philippe BLONDEL
UN HIVER A PARIS, de Jean-Philippe BLONDEL
UN HIVER A PARIS, de Jean-Philippe BLONDEL
UN HIVER A PARIS, de Jean-Philippe BLONDEL

Rédigé par Géraldine

Publié dans #Littérature française

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N
J'apprécie beaucoup cet auteur, surtout en jeunesse d'ailleurs, où il excelle je trouve...!
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A
J'aime bien l'auteur, mais le sujet ne me tente pas.
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C
j'ai été touchée par ce livre!
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E
J'ai bcp aimé : G 229 et Et rester vivant, alors je me laisserai sans doute tenter par celui-là!
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C
Un auteur que j'adore ! Et au vu de ton billet un grand cru, il va falloir que je le trouve !
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T
Joli billet, c'est une lecture qui m'a beaucoup émue aussi.
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A
Toujours pas lu Blondel.... Une lacune qu'il faudrait quand même que je parvienne à combler prochainement !! Bon, ce sujet-ci en particulier ne m'attire pas trop en ce moment, mais il a bien d'autres romans parmi lesquels je pourrais piocher. En passant, tu es lumineuse sur ces photos ! Cette coupe et cette couleur te vont à merveille !
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S
Il est chouette ton billet. Mon fils a fait une prépa (Maths sup') mais heureusement il avait un bon mental. Il a toujours refusé à compétition. J'aime beaucoup Blondel, je le lirai certainement.
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L
il fait bien les effets de main !
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V
La rencontre et ton billet me donnent envie de découvrir cet auteur. A suivre donc :-)
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