Cette semaine, eut lieu la 3ème journée mondiale des troubles bipolaires. Les grands médias n'en n'ont évidemment pas parlé, où alors je suis passée à côté.
Comme mon blog et moi sommes un média, même si assez confidentiel, j'ai décidé d'en (re)parler. Parce que si je touche même une poignée de personnes, ce sera déjà pas mal pour ce mal si répandu, si méconnu, si ignoré et si mal jugé.
Et puis aussi par ce que j'en suis... Diagnostiquée tardivement il y a quatre ans. Bipolaire de type 2. Parce que oui, il y a au moins 2 types de bipolarité, même si l'on ne parle toujours que d'un seul, le plus "spectaculaire", le type 1. C'est comme pour les AVC, les médias insistent sur les symptômes que d'un seul type d'AVC, l'AVC artériel. Alors qu'il existe des AVC veineux, avec d'autres symptômes jamais cités, j'en suis aussi la preuve.
Sur Facebook, j'ai tout de même trouvé cet article de RTL que je copie/colle ici :
La bipolarité une maladie qui détruit des vies mais qui reste très confidentielle et souvent rongée par les préjugés. À l'occasion de la 3e Journée Mondiale des troubles bipolaires, une campagne d'information en ligne a été lancée jeudi 30 mars par la fondation FondaMental et l'Association Argos 2001. Campagne qui propose de "vivre" le quotidien des quelque un million de Français atteints de ces troubles mais aussi et surtout d'"informer les jeunes", car "la méconnaissance, la stigmatisation et les préjugés qui entourent toujours les troubles bipolaires sont un frein à l'accès aux soins", explique la fondation FondaMental sur son site web.
"Mieux les connaître, mieux les comprendre, mieux les soigner". C'est ainsi qu'est résumée la campagne de sensibilisation autour des troubles bipolaires lancée le jour de la naissance de Vincent Van Gogh, le célèbre peintre néerlandais qui s'est tranché l'oreille et s'est suicidé à l'âge de 37 ans. En effet, selon certains experts, Van Gogh était atteint de cette maladie.
La bipolarité, une maladie complexe.Si le diagnostic des troubles bipolaires est souvent difficile à établir, la Haute autorité de Santé (HAS) avance que 1% à 2,5% de la population française en serait atteinte, soit 650.000 à 1,5 million d'individus. Et ces données seraient même sous-évaluées selon la HAS.
Les troubles bipolaires, aussi appelés "psychoses maniaco-dépressives", correspondent à véritable yo-yo émotionnel chez le sujet. Oubliez vos petites sautes d'humeur quotidiennes, il s'agit là vraiment d'émotions exacerbées qui placent à la fois la personne atteinte dans des situations de détresses incommensurables et de joie sans limite. Le sujet alterne alors entre des phases de profonde dépression et des phases d'exaltation, aussi définies comme maniaques. Il s'agit aussi pour les proches de se renseigner pour savoir la réaction qu'il faut adopter et ainsi éviter d'aggraver la situation du sujet.
C'est une des maladies psychiatriques les plus sévères - l'Organisation mondiale de la Santé (OMS) l'a classée parmi les dix pathologies les plus invalidantes - et la réponse médicamenteuse (régulateurs de l'humeur) est souvent la seule qui aide le sujet à garder le cap sur sa vie. Les psychothérapies spécialisées sont également d'une grande aide pour apaiser les souffrances du patient. Les symptômes qui permettent de déceler l'apparition de la maladie sont le plus fréquemment des troubles du sommeil, un repli sur soi, une forte mélancolie ou encore la multiplication des épisodes d'achats ou autres conduites addictives.
Un diagnostic trop tardif. C'est le gros point noir autour de cette maladie. En plus de constituer un trouble psychiatrique très important, la bipolarité n'est diagnostiquée souvent que trop tard et ainsi, les chances d'en réduire les conséquences sur la santé mentale et éviter qu'elle ne soit fatale s'amoindrissent. Car selon la fondation FondaMental, 1.500 personnes décéderaient chaque année par suicide et entre un quart et plus de la moitié des sujets bipolaires font au moins une tentative de mettre fin à leurs jours. De même, la maladie est aussi associée à une baisse de l'espérance de vie de 10 à 20 ans en raison de maladies cardio-vasculaires plus fréquentes.
"10 ans de retard". Selon FondaMental et Argos 2001, à l'initiative de la campagne de sensibilisation autour des troubles bipolaires, il faudrait attendre dix ans entre le premier épisode bipolaire, qui survient souvent entre 15 et 25 ans, et le diagnostic. Pourquoi ? "Les personnes concernées n'identifient pas les signaux d'alerte et consultent souvent trop tardivement", a expliqué Marion Le Boyer, directrice de la fondation FondaMental, dans une interview accordée à Atlantico. D'où l'importance d'une prévention et d'une sensibilisation autour de ces troubles et notamment auprès des jeunes.
ET MOI DANS TOUT CA ?
Des symptômes de bipolarité, avec du recul, je me dis que j'en ai depuis belle lurette. Et pourtant, des psy, j'en ai vu des divers et variés, des normaux, des déglingués ou des déglingueurs... Mais c'est mon AVC (2008) qui a accentué le tout et permis le diagnostique quelques années plus tard (en 2013). Depuis un peu plus de 3 ans, j'ai un traitement qui m'équilibre à peu près, sans effets secondaires indésirables (ou en tous cas, je ne les remarque pas).je ne veux plus y toucher par peur de faire pire aussi, j'essaie de gérer les mauvaises périodes. Je ne souffre donc plus atrocement comme ce fut le cas pendant cinq ans, n'ai plus d'idées morbides ou suicidaires comme ce fut le cas, je ne me fais plus mal. Contre cela, se sont mes chats qui me protègent le plus. Ils sont mon garde-fou, ils comptent sur moi, donc pour eux, je ne peux plus flancher complètement. Et puis ils adoucissent tellement ma vie, par leur présence, par leur douceur physique, par leur amour, par la responsabilité qu'ils me donnent. Et la ronronthérapie, ce n'est pas un mythe.
Il n'empêche, la bipolarité continue de me pourrir la vie, comme souvent aussi elle me l'embellit. Tant je suis capable d'un enthousiasme et d'une énergie délirants pour des bricoles, enthousiasme à double tranchant, qui me fait souvent passer pour une gamine ou pour quelqu'un complètement à l'ouest. Mais l'enthousiasme c'est beau... et c'est aussi fatiguant. Car dans les période up, tout me parait possible, je me dépense à fond les ballons, je prends des engagements... et je réalise quelque temps plus tard que je ne peux pas les tenir. Ca me rend détestable à mes yeux et certainement décevante aux yeux de certains, car malgré mes valeurs morales, je ne suis pas, enfin, je ne peux pas être tout le temps fiable. Alors des fois je préviens, des fois non...
Et puis quand l'enthousiasme s'éteint, c'est terrible. Je deviens girouette sans retour et sans vraiment choisir. Je peux me montrer dure envers certains de mes amis, rompre une amitié (parfois pour me protéger) ou aussi avoir de vilaines pensées envers mon entourage, pensées qui pourraient tout bouleverser si je les émettais. J'en souffre évidemment et me force à taire mes pensées. Ah, vous vous direz, "mais moi aussi". Non, ce n'est pas pareil et je vous renvoie au passage surligné en rouge dans l'article. Trop souvent, de la part de mon entourage qui essaie de me rassurer et /ou de bien faire, j'entends : tu sais, ça m'arrive aussi... Chez moi, tout prend des proportions abyssales ou sommitales, les idées sombres ou joyeuses ont toutes l'effet d'un tsunami qui, pendant 1/4 d'heure, un jour ou quelques semaines, remettent tout en cause. Après, je sais que je souffre de bipolarité, alors je me concentre pour lutter et ne pas laisser le tsunami commettre un désastre irréparable. Mais là aussi, c'est une lutte, où m'aide sans doute une certaine force de caractère.
Car je suis bipolaire de type 2. Ce qui signifie que je lutte contre 2 vagues simultanément. Des vagues qui vont vers le up puis le down (le haut et le bas). L'une sur de très longues périodes, l'autre sur de très (voire très très ) courtes périodes... C'est pour cela que ce type de bipolarité est encore plus dur à diagnostiqué car souvent invisible à l'oeil nu, enfin, à l'oeil de l'ignorant en la matière. C'est pour cela que ma pathologie est souvent oubliée par mes proches ou ignorée par des personnes que je côtoie. Ca aussi c'est fatiguant... Car bien souvent, je suis amenée à devoir "convaincre" que je suis atteinte de bipolarité devant des regards suspicieux qui, je le vois bien, pensent que j'invente un truc pour me justifier "dans mon désordre" ou mon hyper-émotivité.
Il y a les angoisses existentielles et les angoisses qui paraissent bénignes, et qui m'apportent donc soit incompréhensions, soit "gentilles" moqueries. Il y a quelques mois, je disais à ma mère que j'adorais ma vie, que je ne changerai rien pour tout l'or du monde. Rien n'a changé depuis et pourtant, depuis quelques jours, rien ne va plus. Je voudrais tout changer, moi en premier, sauf mes chats que je veux garder pour leurs 9 vies ! Là, je suis épuisée moralement et physiquement et pourtant, en public, je donne le change, je pète la forme, parce que je suis bipolaire type 2... On peut péter la forme publiquement et être au fond du trou, même si celui-ci est pour moi bien moins profond qu'avant. Mais justement, je ne veux pas retomber comme avant, c'est ma hantise, mon cauchemar... Alors comment faire pour se protéger sans dire la vérité pour être comprise, ou en tout cas, avoir une chance de l'être.
Comme je le disais, il y a aussi les angoisses bénignes...qui prennent une ampleur phénoménale. Comme quoi par exemple : finir une vaisselle... j'ai un blocage. Ranger mes placards, j'ai un blocage (heureusement une amie m'y a aider, car je suis incapable de le faire seule, même si je suis capable de partir au bout de monde toute seule). La paperasse, j'angoisse complètement (la phobie administrative n'est pas le privilège des ministres ! ). En ce moment, dans mon frigo, j'ai un très bon fromage de chèvre qui risque de se périmer bien vite. Ca m'angoisse, car j'ai aussi un concombre, des pommes, alors quand vais-je manger mon fromage de chèvre ?). Un resto avec une carte trop fournie, ça m'angoisse. C'est pour cela que depuis des années, dans les crêperie bretonnes, je prends toujours la même galette. Idem quand je fais mes courses,mon caddie est quasiment toujours identiques au précédent. Une invitation qui tombe à un moment où je voulais rester chez moi, c'est terrible. Un des symptômes de la bipolarité, c'est la procrastination. La vraie, pas juste le j'ai pas le courage, je le ferai demain. C'est pour cela qu'en ce sens, mon boulot au Mc Do me convient, puisque tout est à faire dans l'instant et rien ne prend de temps. Voilà, de ces angoisses, je ne parle jamais pour ne pas entendre "oh tu sais, moi aussi des fois..."? Aujourd'hui je le dis.
Bien entendu, je cumule ma bipolarité invisible (parce que camouflée) avec les séquelles invisibles elles-aussi de mon AVC : ma fatigabilité (non, je ne suis pas fainéante, mais quand je n'en peux plus physiquement ou nerveusement, je n'en peux vraiment plus, ce n'est pas une question "d'un petit effort à faire"). Je ne travaille que 3h30 par jour mais quand je rentre chez moi, c'est pour dormir entre 2 ou 3h. Je me concentre difficilement et ma mémoire de travail est une vraie passoire. Résultat, au bout d'un an au Mc Do, je ne sais toujours pas utiliser les caisses entièrement, d'autant plus que j'y suis rarement. Ce que je ne fais pas régulièrement, j'oublie. Ah, et puis il y a aussi mon fameux "manque du mot", qui fait souvent rire les gens ou qui les font dire encore une fois "oh tu sais, ça m'arrive aussi". Moi, c'est quotidien. Je peux dire "il est parti avec le parasol ou lieu de dire il est parti avec le balais". je dis que je retire mon pull alors que c'est mon blouson que je retire.
Alors certes, aux yeux du monde, je m'en sors pas mal et ce n'est pas faux, certaines personnes sont bien plus atteintes que moi. Je dois cela à ma force de caractère, aux nombreuses passions qui animent ma vie et à mes chats. Mais tout de même, même si par moment j'arrive à dire que ma vie me convient parfaitement, et bien tout cela n'était pas prévu au programme. Et je dois faire avec l'idée que jamais plus je ne pourrais travailler normalement 35h/semaine avec un métier qui m'enrichit culturellement (Sniff Nouvelles Frontières), que je ne peux plus faire de projet de carrière et évoluer et que de ce fait, je ne pourrais jamais offrir une maison avec jardin à mes 3 loulous d'amour. Et en ce moment, je le vis très mal. Comme tout bipolaire, j'attends la prochaine vague qui me ramènera au dessus et me protège dans mon cocon et le petit univers que je me suis créé.
Bon désolée, je ne veux pas pourrir votre dimanche, mais surtout témoigner sur cette maladie "honteuse" parce que mentale. Et puis, si ça se trouve, dans 3 jours, je surferai sur une nouvelle vague.