L'HOMME QUI VOYAIT A TRAVERS LES VISAGES, d'E.E SCHMITT
Publié le 19 Septembre 2016
Roman - Editions Albin Michel - 421 pages - 22 €
Parution le 30 août 2016 - Rentrée Littéraire
L'histoire : Charleroi, Belgique, de nos jours. Augustin, squatter qui se rêvent journaliste, squatte la nuit et effectue un stage non rémunéré au journal Demain. Augustin est insignifiant, voire transparent aux yeux des autres. Jusqu'au jour où il assiste à un attentat à la sortie d'une messe où il voit tout, même l'invisible. Car Augustin possède un don, celui de voir les morts (anges ou démons) qui accompagnent leurs vivants.
Sachant cela, la juge le somme d'enquêter sur le ou les coupables de toute cette violence : Dieu, ou les Hommes ?
Tentation : E.E.S est l'un de mes auteurs fêtiches !
Fournisseur : Gilles Paris, merci pour l'envoi !
Mon humble avis : Il me semble (à moins que la mémoire me fasse défaut), que c'est la première fois que je sors sans enthousiasme débordant d'un livre d'Eric Emmanuel Schmitt. Certes, cette lecture est globalement plaisante - malgré quelques longueurs - fluide et spirituellement enrichissante et intéressante.
L'intention de cette histoire est on ne peut plus louable, mais le procédé narratif, quelque peu inhabituel, m'a déstabilisée, voire égarée par moment. Même si la fin du roman justifie justement ce procédé, je ne suis pas convaincue, car il m'a semblé y avoir un réel décalage avec le Schmitt que j'apprécie. J'aime être surprise par un auteur, mais être désorientée à ce point m'a par moment déplu. Des personnages farfelus, un peu trop de démagogie, des répétitions dans les propos d'Augustin, le narrateur, des situations peu vraisemblables, et pour cause sans doute, mais bon, je ne peux trop rentrer dans les détails et justifier mes propos sous peine de spoiler les dernières pages.
De fait, il m'a fallu une centaine de pages avant d'entrer dans l'histoire et de m'approcher de ce que je cherchais dans cette oeuvre. Schmitt aime écrire des romans "lumière et miroir". Lumière pour éclaircir le lecteur, miroir pour que celui-ci s'y retrouve. Avec l'Homme qui voyait à travers les visages (soit dit en passant, je trouve le titre très mal choisi), nous sommes, selon moi, surtout dans le roman lumière.
Qui nous inspire dans la vie, jusqu'où va notre libre arbitre, qui pense, écrit, agit à travers nous. Voilà l'une des questions essentielles développées ici.
Mais surtout, qui est responsable de la violence contemporaine générée au nom de Dieu ? Dieu lui-même, les hommes, Dieu à travers les hommes ou vice et versa ? Pour répondre à cela, Schmitt nous propose une rencontre avec Dieu himself lors d'un long dialogue mené par Augustin. Et l'originalité est qu'Augustin interviewe Dieu en tant qu'auteur de 3 livres : l'Ancien Testament, le Nouveau Testament et le Coran. Cette partie est réellement passionnante et permet de réfléchir à l'évolution des religions au cours des siècles, leurs points communs et les différentes lectures qui sont faites de ces trois livres, avec les conséquences que l'on connaît hélas. Bien sûr, on peut compter ici sur l'érudition d'Eric Emmanuel Schmitt pour nous captiver et nous inciter à s'interroger sur le christianisme ou l'islamisme qu'il y a en chacun de nous, que l'on soit croyant ou athée mais humaniste. Personnellement, cela m'a permis de discerner encore plus la lecture que certains de mon entourage font du nouveau testament et d'en constater encore plus les contradictions dans la pratique.
Dieu a mal à l'homme, car l'homme lit et interprète mal ses livres !
Autre petit détail sympa, Eric Emmanuel Schmitt se met en scène dans cette histoire, dans son propre rôle d'écrivain. Qui plus est, il nous invite dans sa demeure proche de Charleroi, notamment dans son salon tapissé de... livres, évidemment.
Conclusion donc : oui, dans le fond, bof dans la forme !
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