TU TOMBERAS AVEC LA NUIT, de René FREGNI
Publié le 1 Mars 2017
Roman - Editions Folio - 172 pages - 5.90 €
Parution d'origine en mars 2008
L'histoire : Lors d'un atelier d'écriture qu'il anime dans les prisons, René Frégni rencontre Max, un truand marseillais.
Une belle amitié née entre eux. Une fois Max sorti de prison, Max sauve René du harcèlement constant et menaçant d'une famille indésirable dans son quartier. Peu de temps après, les deux hommes ouvrent un restaurant ensemble... Ce qui vaudra à René Frégni une terrible garde à vue, puis l'acharnement du juge, qui durera des années.
Tentation : Sylire
Fournisseur : Ma CB et ma PAL depuis !
Mon humble avis : Ah, quelle claque littéraire bienvenue et finalement assez inattendue en entamant ce livre ! Tu tomberas avec la nuit se lit comme un roman, mais il est tout à fait autobiographique, même s'il est sans doute un peu romancé par moment.
Dès la première page, l'auteur René Frégni, qui est aussi le narrateur, annonce tout de go : "Ce soir, je vais tuer le juge". C'est déjà un gros coup de poing, et cela fait de cette oeuvre comme une "chronique d'une mort annoncée". Comme un tapis que l'on déroule, les pages que l'on tourne sans s'en rendre compte mènent à cette fin qui semble inéluctable.
J'ai tout de suite su que ce roman allait me marquer, et me garder prisonnière volontaire.
Comme si je décelais entre les lignes ce "petit plus" qui manque si souvent à mes lectures ces derniers temps. L'auteur y est assez factuel, donc pas de perte de temps dans des descriptions et des lamentations interminables. Non, René Frégni va droit au but, sans chercher les effets de styles flamboyants. Il y a une espèce de simplicité dans la narration chronologique des faits. Et pourtant, on ressent parfaitement l'incrédulité du narrateur, puis son effroi au fil des mois qui passent. De la simplicité oui, mais aussi une belle poésie de-ci delà. Bref, une sensation de sincérité incroyable !
Avec René Frégni, on découvre l'univers carcéral du côté des visiteurs. On participe avec lui aux ateliers d'écriture qu'il anime, on rencontre les prisonniers qui aiment cette bouffée d'oxygène hebdomadaire, soit comme une "simple distraction", soit par amour des mots, de l'écriture, des livres.
Et puis il y a Max. Qui après sa sortie de prison, et grâce à sa réputation, sauvera René Frégni et sa fille de l'acharnement cauchemardesque d'une famille de dégénérés. Puis l'ouverture du restaurant de Max et René... Et "un beau matin", la brutale perquisition chez René, la garde à vue de 72 heures dans des locaux dignes du moyen-âge. A l'issue de celle-ci, Frégni se révèle bien innocent du soupçon de blanchiment d'argent. Et pourtant, le juge Second s'acharnera sur lui bien au-delà de ses prérogatives pendant des mois, puis des années. Un acharnement qui mènera Frégni à la ruine et à l'impensable.
Avec sa plume délicieuse de poésie, d'humour et sans concession, René Frégni dénonce le scandale des lieux de détentions français, mais surtout, une certaine justice gangrénée par certains hommes qui semblent avoir tous les pouvoirs, sans aucune surveillance d'une autorité supérieure.... A savoir, l'histoire de René Fregni s'est déroulée quelque temps après celle d'Outreau, qui manifestement n'avait pas encore servi de "leçon" et de contre-exemple à la justice française.
Tu tomberas avec la nuit est donc un roman très très fort, à lire absolument. Et pour moi, une nouvelle rencontre avec un écrivain, qui annonce donc d'autres lectures qui je l'espère, se révèleront aussi savoureuse !