SEULE EN SA DEMEURE, de Cécile COULON
Publié le 30 Octobre 2021
Roman - Editions L'Iconoclaste - 333 pages - 19 €
Parution le 19 août 2021 : Rentrée littéraire
L'histoire : Nous sommes au XIXème siècle... Aimée qui pour la première fois la maison familiale pour épouser Candre, un riche propriétaire du Jura... Celui-ci vit dans un vaste domaine, avec la servante Henria et le grand fils de celle-ci. Au cimetière le plus proche, gît Aleth,sa première épouse... Candre est très pieux, aimant mais distant, taciturne. Au fil des jours, Aimée sent comme un mystère tabou autour de la mort d'Aleth. Celui-ci s'épaissit et alors, le domaine devient oppressant et ses habitants semblent menaçant. C'est le début du cauchemar pour Aimée... Dont seule pourrait peut-être la sauver Emeline, sa professeur de musique, qui éveille et ouvre aussi son corps qui restait jusque là si fermé.
Tentation : Blogo et curiosité
Fournisseur : une carte KDO de mes anciennes collègues
Mon humble avis : Je n'avais encore jamais lu de roman de Cécile Coulon et pourtant ce n'était pas l'envie qui m'en manquait. Cette rentrée littéraire et les éloges lus de-ci de-là sur ce nouvel opus m'ont fait dire : le moment est venu !
Et aucun regret car quel roman ! Je découvre ici une fameuse plume, soignée, maîtrisée, qui semble sortir d'une autre époque et convient si bien au sujet du roman. Avec poésie, Cécile Coulon a l'art de rendre un environnement tantôt délicieux, tantôt menaçant. Les descriptions des mouvements de la nature, du domaine et de la maison éveillent vraiment les sens, donnent à sentir et ressentir les souffles du vent, qui tantôt caressent tantôt giflent, le silence pesant entre de hauts murs etc. La nature semble ici plus vivante que les protagonistes de chaire et d'os. L'atmosphère devient un personnage à part entière.
Evidemment, lorsqu'on lit "Seule en sa demeure", on ne peut que penser à Rebecca, de Daphné du Maurier et je pense que la romancière Cécile Coulon ne se cache pas de cette inspiration... Nous avons un domaine, une jeune deuxième épouse, un mari riche et puissant, une domestique omniprésente et une première épouse dont le décès s'entoure de mystères et de non-dits. Mais la comparaison s'arrête là... Car dans ce domaine, point de mondanité, de réceptions, mais une vie calme, ennuyeuse pour Aimée, et glaçante pour le lecteur. Et puis la fin et les révélations qui l'entourent (que je tairai bien sûr) n'ont rien à voir mais sont toutes aussi inattendues que surprenantes. Elles respectent aussi les convenances de l'époque... Et tout ceci m'a fait dire que je suis bien contente d'être une femme libre du XXème siècle !
Cécile Coulon se joue de son lecteur, en semant le trouble et le doute de façon assez subtile... dans le sens où l'on se demande si le doute est justifié, si Aimée le ressent vraiment ou si c'est l'écrivaine qui le distille pour inquiéter son personnage, le lectorat... En tout cas, la tension est bien là et va grandissante... surtout lorsque Claude, le cousin d'Aimée, lui fait parvenir un certain message... Seule en sa demeure est donc bien un hui-clos psychologique qui explore les zones d'ombres, le dévouement, la passion de ses personnages, le poids du mensonge.
S'il m'a parfois manqué un peu d'émotions (mais en même temps, au XIXème, les gens étaient bien moins démonstratifs, surtout dans les milieux huppés) je dois avouer que le dernier tiers du roman m'a littéralement ferrée.
Je suis donc ravie de cette lecture, et à coup sûr, sitôt que ma PAL aura baissé notablement, j'irai piocher à la bibliothèque les anciens titres de cette déjà jeune mais grande romancière, donc j'admire la culture et la maturité à chacun de ses passages télévisés.