AYA, de Marie-Virginie DRU
Publié le 14 Décembre 2021
Roman - Editions Mon Poche - 227 pages -7.70 €
Parution Poche juillet 2021 / Albin Michel 2019
L'histoire : Sur une île de Casamance (Sénégal), Aya a 12 ans... Son père est mort noyé lors du naufrage du Joola, son frère est parti cherché une vie meilleure ailleurs pour aider financièrement sa famille, et sa mère a perdu l'esprit. Aya est donc une proie facile pour son oncle Boubacar, qui régulièrement, abuse de sa nièce... Jusqu'à "l'enceinter"... Aya doit fuir son village... Récemment une journaliste Toubab lui a parlé de "La maison rose", à Dakar... Qui accueille les enfants des rues et jeunes filles comme elles... C'est dans cette Maison rose, qu'en donnant la vie, Aya renaîtra.
Tentation : Le titre
Fournisseur : Ma CB
Mon humble avis : Encore un roman que j'ai acheté essentiellement pour son titre : Aya... Qui est le nom que j'ai donné à la première minette que j'ai adoptée il y a 8 ans, alors que je venais de lire la série BD Aya de Yopougon.
J'ai donc appris dans ces pages, qu'Aya signifie "jeudi" en Wolof.
Aya... Quel beau roman, simple, très touchant et aussi bouleversant, mais surtout sincère. Cela faisait longtemps que je n'avais pas eu autant hâte de retrouver mon livre et son héroïne, à laquelle on ne peut que s'attacher et dont on ne peut qu'admirer la force de caractère et de résilience.
Aya n'est encore qu'une enfant lorsqu'elle se retrouve engrossée par son oncle dont elle est l'obsession. Bien entendu, à son âge et là où elle vit entourée de traditions, Aya ne sait rien de ces choses-là, qu'elle ne comprend pas... C'est forcément un châtiment d'un mauvais esprit ou de Dieu... Sur son chemin, elle croise Camille, journaliste photographe, avec qui elle se lie d'amitié, et à qui elle fait visiter son ile... Camille voit bien qu'Aya n'est pas au mieux de sa forme et l'emmène au dispensaire, juste avant de reprendre l'avion... Aya vivra quelque temps seul avec son secret qu'elle peine à admettre et à se figurer pleinement... Jusqu'à ce qu'elle en parle à Madeleine, sa voisine, qui lui dit : Pars, va dans cette Maison rose, je m'occuperais de ta mère.
C'est dans cette Maison Rose qu'Aya va trouver de l'amour, de la compréhension, de l'accompagnement, du dialogue, des confidentes... et la confiance en elle va de nouveau s'immiscer. De cet enfant dont elle ne voulait pas, Aya tombera en amour fusionnel dès sa naissance... Elle n'a que 13 ans lorsque d'enfant, elle devient mère... et donc avec des responsabilités d'adultes et de choix à faire... Mais Aya a fait son choix : vivre, être libre, s'assumer, que son fils soit fier d'elle.
C'est un très beau portrait de jeune fille que nous propose ici Marie-Virginie Dru. Une jeune fille qui vit si loin de nous et qui survit à l'indicible. Mieux même, elle renaît avec son fils. Aya est à la croisée des chemins, dans son mode de pensée qui aborde tout juste l'adolescence alors qu'elle a grandi si vite, en brûlant les étapes malgré elle.
Et puis il y a la Casamance, où Marie-Virginie Dru nous emmène, où elle nous donne à voir, à observer, à sentir, à ressentir, à vivre le quotidien comme l'exceptionnel avec la cérémonie d'initiation des grands garçons... Bref, pour nous, l'exotisme. Une Afrique de ferveur et de fragilité, ou le temps semble passer sans heurts mais qui n'offre pas une vie simple ni un avenir radieux... Alors il est aussi question des migrants, avec Djibrill, le frère d'Aya, parti depuis longtemps, de nuit sur un bateau.
L'écriture est simplement belle, fluide et parsemée de poésie. J'ai juste un petit bémol sur le style... La narration est à la troisième personne du singulier, et de temps en temps, à la première personne, par la voix d'Aya... Je n'ai pas saisi le pourquoi de ce changement, à part peut-être la recherche d'une originalité, mais qui pour moi n'étais pas nécessaire.
Un beau roman, triste et heureux, qui malgré les épreuves et la cruauté de la vie, développe une belle espérance. Et une héroïne que l'on n'oublie pas, pour qui l'on garde une place chaude dans notre coeur et notre esprit, pour elle, et toutes les petites filles qui, de par le monde, vivent les mêmes épreuves qu'Aya. J'ai beaucoup aimé.