J'ENVISAGE DE TE VENDRE, de Frédérique MARTIN
Publié le 9 Février 2016
(J'y pense de plus en plus)
Nouvelles - Editions Belfond - 220 pages - 17.50 €
Parution en janvier 2016 (Nouveauté !)
La 4ème de couv' : Vous allez reconnaître les papiers peints, les rues pavillonnaires et les temples d'achat, la campagne bucolique et votre quotidien. Votre femme, votre mari, votre mère ne sont pas loin ; tout vous semblera familier. Oui, ça se passe près de chez vous. Mais les choses ont mal tourné.
De quoi demain sera-t-il fait ? En déréglant les curseurs de notre société, Frédérique Martin convoque le règne des indignités ordinaires et flanque nos libertés au vestiaire. Voici venir le grand show des luttes de classes et de sexe, des dominations ou de la logique marchande. On peut désormais nous séquestrer, nous forcer à jouer, orienter nos choix ou décider à notre place. On peut aussi envisager de nous vendre. Mais pas que.
Vous aimez vous faire peur pourvu qu'à la fin tout se termine bien ? Vous verrez, on en a tenu compte.
Tentation : Titre et Pitch
Fournisseur : Belfond, merci pour l'envoi
Mon humble avis : Difficile de résumer 12 nouvelles, exercice auquel je ne suis point rompu. Aussi, ci-dessus, je me suis contentée de recopier la 4ème de couv, qui évoque parfaitement, sans trop en dire, le ton de ce recueil.
Ah ! Que ce fut bon ! Quel régal de lecture. Déjà, le style est aux petits oignons (ou ognons, c'est vous qui choisissez la version de la langue française que vous préférez ! ) : Percutant, direct et soigné à merveille. C'est comme si chaque mot avait été choisi avec précision parmi des centaines.
Frédérique Martin, auteur à découvrir en amont et en aval de ce livre, fait preuve d'une imagination ardente et d'un sens aigu de l'observation ? Qu'a-t-elle étudié pour aboutir à l'écriture de ces histoires ? L'homme (je, tu, il, nous, vous, elles) en tant qu'individu et part de notre société, pleine de travers et de dérives tantôt absurdes, tantôt abjectes. Peu importe que Frédérique Martin multiplie ces travers par 1.1 ou par 10, le résultat est plausible et... glaçant.
Les sujets principaux de ces 12 destins sont : l'individualisme qui devient un délit, voire un crime. Et à l'opposé, l'hyper interventionnisme de tout et de tout de le monde, que ce soit au niveau de l'Etat comme de celui du voisinage. Le choix, qui, synonyme de liberté est aussi une prison. La privation de liberté est ici opposé à l'extrême liberté dans une société qui a de moins en moins de tabous. La surenchère de la communication, de la représentation, du consumérisme.
Imaginez une société ou le choix d'une "mort digne" est devenu une obligation. Où jouer au loto, au concours divers et variés qui vous promettent des lots merveilleux est imposé au point de devoir atteindre des quotas. Où l'on peut vendre ses parents sur une braderie une fois qu'ils sont devenus trop encombrants. Où un suicide devient le sujet principal en direct d'une émission télé de grande écoute. Où, si vous êtes femmes célibataires sans enfant alors que vous occupez un travail et un logement, vous passez en procès public diffusé à la télé. Etc, j'en passe et des meilleurs, je ne vais pas tout vous dévoiler non plus !
Quelle audace dans chacune de ces nouvelles traitées avec finesse et profondeur. C'est cynique à souhait, sardonique, ironique, moqueur, impertinent, mais jamais grossier ni vulgaire. C'est aussi glaçant qu'exaltant, terrifiant qu'étourdissant ! Bref, c'est délicieux !... En espérant que "J'envisage de te vendre" reste juste une oeuvre littéraire et ne devienne pas notre avenir si proche...