PETIT PAYS, de Gaël FAYE
Publié le 8 Mars 2019
Roman - Editions Livre de poche - 221 pages - 7.20 €
Parution d'origine chez Grasset le 24/08/2016
L'histoire : Gaby a 10 ans. Franco-Rwandais (français par son père, rwandais par sa mère), il vit en famille dans une impasse à Bujumbura, alors capitale du Burundi. Sa mère fuit les massacres et la tension politique du Rwanda. Dans cette impasse, avec quelques copains Gaby mène une douce enfance, relativement insouciante et protégée. Puis la guerre civile éclate, et alors, tout bascule pour Gaby.
Tentation : La réputation du livre
Fournisseur : les étagères d'Armelle
Mon humble avis : Ce roman a défrayé la chronique lors de sa sortie, puis lors de son couronnement par le Goncourt des Lycéens... Une fois de plus, je suis en retard par rapport à "tout le monde", et une fois de plus, je me suis prise en gifle, du genre de celle qui marque longtemps, avec ce petit pays.
Comme je comprends l'engouement général envers ce roman qui est, à mes yeux, un véritable chef d'oeuvre. Captivant, bouleversant, tendre et dur à la fois, Petit Pays remue autant les entrailles que le coeur, il attendrit autant qu'il atterre et révulse, le tout dans une écriture très fluide, franchement agréable.
Ce roman n'est pas autobiographique, même si Gaël Faye y met ses souvenirs d'enfance africaine, depuis les copains, jusqu'à l'atmosphère, en passant par les odeurs, les saveurs, les lumières, les sons, la chaleur, les pluies, les coutumes. Gaël Faye nous emmène au Burundi, pour le meilleur d'abord, puis le pire. Mais c'est sûr, en tant que lecteur, "nous y sommes".
La première partie conte donc cette enfance privilégiée, avec ces questionnements, malgré un contexte familial et géopolitique compliqué et déjà tendu. Au Burundi, vivent aussi des réfugiés zaïrois, mais surtout Rwandais (Les Tutsi qui fuient les massacres perpétrés par les Hutus)... Tout cela pour "une histoire de nez"... Bref, une question d'ethnies...
Puis au Burundi, viennent les premières élections libres, suivies de près par un coup d'état et le début d'une guerre civile qui durera plus de 15 ans. De façon presque simultanée, le président du Rwanda voisin est assassiné. Les massacres se transforment alors en génocide contre les Tutsis, dont les plus chanceux se réfugient au Burundi, pays alors aussi en guerre.
Yvonne, la mère de Gaby, retournera au Rwanda à la recherche de sa famille, et reviendra marquée à jamais par les charniers dont elle est témoin...
Et pendant ce temps, Gaby grandit un peu, si peu... Deux ans, c'est peu dans la vie d'un enfant... mais au milieu de toutes ces guerres et ces haines incompréhensibles, il lutte très fort, contre lui-même et le monde pour justement, rester un enfant... Il se réfugiera alors dans la lecture... avant que le monde ne le rattrape dans son antre. Cette lutte pour ne pas quitter l'enfance est le coeur de ce roman.
Par certains côtés (l'impasse, la vie de quartier, des enfants avec le monde qui ne bouge pas dans le bon sens tout autour d'eux), Petit Pays m'a fait penser à "Ne tirez pas sur l'oiseau moqueur" d'Harper Lee. Il en a, de toutes façons, la même puissance, la même densité (impossible d'évoquer tous ses sujets- dont l'exil - en un seul billet). Saisissant jusqu'à la toute dernière page. A lire impérativement si ce n'est pas déjà fait !