DANS LES FORETS DE SIBERIE, BD de Virgile DUREUIL
Publié le 8 Décembre 2022
BD - Editions Casterman - 112 pages - 21.99 €
Parution en Novembre 2019
Le sujet : De février à juillet 2010, l'écrivain voyageur a choisi de vivre la fin de l'hiver puis le printemps sibérien. Habitant seul une cabane au bord du Lac Baïkal, il s'est plié au silence en choisissant de vivre lentement, environné de livres, de vodka et de souvenirs. Sans déranger la nature mais en s'interrogeant avec elle dans une introspection au long cours, Tesson a marché, exploré, pêché, il a fait du patin à glace sur le lac et accepté l'hospitalité de ses rares voisins. Cette ascèse de six mois loin de la France, l'auteur en a fait le récit dans son célèbre livre paru chez Gallimard en 2011
Tentation : Titre et référence Tesson !
Fournisseur : Bib de Dinard
Mon humble avis : Des 6 mois d'ermitage de Sylvain Tesson au bord de lac Baïkal en Sibérie est sorti un livre que je n'ai pas lu, et un film magistralement interprété par Raphaël Personnaz que j'ai vu, et dont vous pouvez lire mon billet ICI .
Ayant adoré le film, je n'ai pas hésité une seconde lorsque j'ai trouvé la BD à la bibliothèque.
Une bonne coupure avec le monde actuel n'est jamais de refus. Un temps de lecture qui m'emmène loin, au milieu de rien et de nulle part, dans le silence, l'observation, l'introspection, le rapport à la nature et à soi-même, c'est toujours agréable et bénéfique. Cela permet de stopper un peu la course infernale de la société de consommation, de revenir à l'essentiel et de se poser les bonnes questions, tout en tentant d'y trouver des réponses réalistes.
C'est ce qu'a fait Sylvain Tesson pendant ces 6 mois. Revenir à l'essentiel... D'ailleurs, il a compté le nombre d'action dans ses journées : 15 ! Ai-je déjà compté les miennes ? Non, mais elles sont certainement bien plus nombreuses, bien plus vaines, bien moins en pleine conscience.
Cet album est magnifique, et les dessins rendent très bien cet environnement qui peut être tantôt refuge, tantôt hostile si on ne prend pas garde aux signes qu'ils envoient. Une vie où tout se mérite et ou tout ne tient qu'à soi-même, une autarcie complète... Pour la chaleur, il faut couper du bois, pour manger, il faut pêcher, pour échanger avec quelqu'un, il faut marcher plus de 5 heures dans des températures bien en dessous de zéro.
Les paysages sont sublimes. Teintés de bleu pour l'hiver profond, puis tendant vers le vert au fur et à mesure que le printemps s'installe. Les bulles sont les pensées de Sylvain Tesson, et les dialogues réduits à leurs plus simples expressions (différence linguistique oblige) avec les quelques Russes qu'il côtoie de temps en temps durant ces 6 mois qui forment chacun un chapitre.
De très beau passage, des citations à retenir, une belle incitation à la pause, à la lecture, à la contemplation, à l'effort, à la solitude, au rapport juste avec la nature... Ne pas y vivre en conquistador, en colonisateur, mais en invité passager. J'ai juste regretté quelques ellipses et l'absence de certains détails qui m'auraient intéressée, mais rien de bien grave.
L'anarchiste rêve de détruire la société dans laquelle il se fond. Le hacker aujourd'hui fomente l'écroulement de citadelles virtuelles depuis sa chambre. Tous deux ont besoin de la société honnie. Elle constitue leur cible et la destruction de la cible est leur raison d'être.
L'ermite se tient à l'écart, dans un refus poli. Si la société disparaissait, l'ermite poursuivra sa vie d'ermite. Les révoltés, eux, se trouveraient au chômage technique.
Rien ne vaut la solitude. Pour être parfaitement heureux, il me manque quelqu'un à qui l'expliquer.
Quand on se méfie de la pauvreté de sa vie intérieure, il faut emporter de bons livres: on pourra toujours remplir son propre vide.
L'immobilité m'a apporté ce que le voyage ne me procurait plus.
Faut-il tuer Dieu, mais se soumettre aux législateurs, ou bien vivre libre dans les bois en continuant à craindre les esprits ?
Usage de la fenêtre : inviter la beauté à entrer et laisser l'inspiration sortir
L'homme libre possède le temps. L'homme qui maîtrise l'espace est simplement puissant.