ENTRE FAUVES, de Colin NIEL
Publié le 26 Septembre 2024
Thriller - Editions livre de poches - 376 pages - 8.90 €
Parution poche janvier 2022 - Editions du Rouergue 2020
Mon pitch : Apolline a 20 ans et est une excellente archère. Pour son anniversaire, son riche de père lui offre un arc ultra perfectionné... et une chasse au trophée, un lion en Namibie.
Komuti est un jeune Himba en Namibie et un vieux lion, connu pour ses massacres sur le bétail vient de décimer le troupeau de chèvre de son père.
Martin est garde dans un parc National des Pyrénées. Sa mission notamment, protégée le dernier ours du Béarn.
Et enfin, Charles est le vieux lion, celui qui marquera à jamais la vie des trois personnages.
Tentation : la blogo
Fournisseur : La cabine à livre en bas de chez moi
Mon humble avis : Ne jamais sous estimer sa proie...
Un an et demi que ce roman m'attend sur ma table de chevet, et je l'ai enfin... dévoré. Car oui, il est captivant et rondement bien mené par un auteur qui sait de quoi il parle, déjà par sa formation professionnelle et ensuite par moult rencontres et recherches pour rédiger cette histoire.
Celle-ci malmène l'amoureuse des animaux sauvages ou non que je suis, l'anti-chasse de loisir que suis aussi, même si l'auteur est très loin d'en faire l'apologie. Mais évidemment, même si les détails sont tus, la souffrance animale lors de scènes de chasse n'est pas éludée.
Les trois personnages humains prennent la parole à tour de rôle et représentent une position sur la chasse, sur la préservation de la biodiversité, sur la cohabitation humains animaux.
Komuti est celui qui vit au dépend de la préservation de la faune sauvage et des espèces en voie d'extinction décrétées par les instances internationales. Les éleveurs de son village subissent régulièrement les assauts d'un vieux lion solitaire sur leurs troupeaux. Cow killer, individu problématique, le gouvernement signe la mise à mort du lion, mise à mort proposée au plus offrant... Ce sera la Française Apolline accompagnée de son père, un abruti de première classe.
Apolline est née dans une famille qui ne jure que par la chasse aux trophées et à 20 ans, son palmarès comme son bilan carbone font frémir. Elle est passionnée et connait parfaitement ses proies et son arme : un arc 2.0 etc. Ses proies qu'elle s'approprie .... Mon lion, mon zèbre. Son trip, le perfect shot, le tir fatal, sur toute cible, son pouvoir sur la destinée de l'animal dans son viseur. Mon trip à moi, le perfect shot en photo, et jamais en dérangeant sciemment le modèle.
Martin est un passionné de nature... et un obsédé de Cannellito, le dernier ours du Bearn dont plus aucune trace n'a été relevée depuis trop longtemps. Ca, c'est la façade officielle. Car sur internet, il est l'un des modérateurs d'un groupe d'extrémistes anti-chasse, groupe qui livre en pâture à l'opinion/vendetta publique photos, identités et coordonnées de certains chasseurs aux trophées qui se ventent de leurs chasses exotiques, photos à l'appuis, sur les réseaux.
Enfin, Charles le lion, trop vieux, a été banni par son clan. Il erre donc seul dans un pays où la sécheresse sévit de plus en plus, où les proies sauvages diminuent d'autant. Charles n'a d'autres choix que de s'approcher des troupeaux et des humains s'il veut manger et survivre. C'est l'auteur qui prend la parole pour lui.
Colin Niel nous permet de pénétrer l'âme de chacun et d'être au plus près de ses convictions, de ses choix, pour les comprendre, sans forcément les excuser. Les comportements des personnages sont finement analysés et rapportés.
Evidemment, pour X raisons qui constituent une bonne partie du roman, cette chasse pourtant facile car tellement organisée en amont va tourner au désastre et à la catastrophe. Et celle-ci aura des répercussions dramatiques aussi dans les sommets pyrénéens.
Colin Niel use d'un formidable talent de conteur pour provoquer notre affection pour un personnage, affection qui devient abjection ensuite ou vice et versa. On reste dans l'empathie pour Komuti car dans l'absolu, il est le moins responsable dans ce carnage et il en subit directement les conséquences. Mais Colin Niel nous montre bien, dans cette histoire, que même si certains pensent bien faire ou être dans leur bon droit, nul n'est tout noir ni tout blanc. Evidemment que ce roman est globalement anti chasse, même s'il pose des bémols suivant les conditions... puisque la lectrice que je suis comprends que ce lion puisse être abattu. Mais Colin Niel est implacable envers la marchandisation extrême de ces chasses aux trophées et de certains de ces chasseurs qui prennent le monde entier comme un terrain de jeux ni plus ni moins.
Mais ce que Colin Niel dénonce sans détour, c'est la vanité humaine et ses inconséquences qu'elles soient passées ou contemporaines, ses aveuglements. Car ce sont elles, et uniquement elles qui sont à l'origine de ces drames. Le pire des fauves, c'est bien l'humain, qui n'est mu ici que par sa fatuité et qui se contente des apparences pour se forger une opinion. Il en va ainsi pour les trois personnages principaux, comme pour chacun de nous, même si bien moins directement... Car, si pas de réchauffement climatique, moins de sécheresse, moins d'attaque de faune sauvage sur les troupeaux... donc...
Pourquoi pas un coup de coeur ? C'est vrai, j'en étais tout près... Mais les deux chasses, à l'animal en Afrique et à l'homme dans les Pyrénées m'ont paru trop longues et répétitives dans leur narration.
J'ai vraiment beaucoup aimé ce roman qui pose les bonnes questions, expose les arguments des uns et des autres tout en nuançant les propos, laissant libre le lecteur de se faire son opinion. Colin Niel, un nouvel auteur pour moi que j'ai bien l'intention d'approfondir !
L'avis de Violette