PECHEUR D'ISLANDE, de Pierre LOTI

Publié le 8 Octobre 2024

Roman - Editions Livre de poche - 253 pages - 5.20 €

Parution d'origine en 1886

Mon pitch : Comme tant d'autres navires chaque année, La Marie navigue vers l'Islande emportant à son bord ces marins qu'on appelle "Les islandais", les pêcheurs de morue. Parmi eux, Yann, grand, fort, sauvage, libre, indépendant. A terre, près de Paimpol, il y a Gaud, demoiselle ayant vécu à Paris, qui reviens avec son père sur sa terre natale. Gaud tombe éperdument amoureuse de Yann... Mais ils ne sont pas du même milieu social... Et puis de toute façon, Yann n'aime que la mer : "Un de ces jours oui, je ferai mes noces, mais avec aucune fille du pays ; non, moi, ce sera avec la mer et je vous invite tous, ici autant que vous êtes, au bal que je donnerai..."

 

 

Tentation : Ma PAL et le Challenge Book trip en mer

Fournisseur : Ma PAL

Mon humble avis : C'est cette très vieille édition antédiluvienne, achetée d'occasion il y a une bonne dizaine d'années que j'ai lue... A l'intérieur est écrit "Tous droits réservés, y compris pour l'URSS"....

Et c'est subjuguée de tant de beauté littéraire et romanesque que j'ai parcourue ces pages. Je ne m'attendais pas à une telle claque ! On boit, ou plutôt on sirote, on déguste les mots de Pierre Loti qui se fait tour à tour peintre, poète, sculpteur, romancier, marin, femme de la terre, homme de la mer et s'il n'était d'un autre siècle, je pourrais ajouter photographe... Tellement son style donne à voir, à sentir, à ressentir, à humer. Il donne vie et relief aux éléments qui deviennent personnages part entière... Les tempêtes bretonnes, le soleil de minuit, la brume en mer, le vide, le blanc, les flots déchaînés... On pourrait se croire dans une pièce obscure à regarder des diapositives sublimes. Et le tout, avec une écriture ciselée, immémoriale et pourtant tellement fluide, qui se fait douce ou âpre à l'oreille et au coeur en fonction de ce qui est conté.

A postériori, Pêcheur d'Islande est aussi un formidable témoignage d'une époque, d'une région (la Bretagne paimpolaise), d'une microsociété, celle des Islandais, ces marins qui partaient de longs mois chaque année, et chaque année, nombre d'entre eux manquaient à l'appel au retour... Il y a les hommes en mer, les femmes à terre qui préparent le départ, puis que vivent l'absence, travaillent, accouchent, puis attendent impatiemment le retour des hommes qui était festoyé. Et puis, il y avait ces jeunes marins, ces jeunes hommes, qui "au service de l'Etat" étaient envoyés pour cinq ans en bateau pour un long voyage jusqu'en Chine, où une guerre terrible faisait rage... Ils devenaient alors soldats, et nombre d'entre eux n'en revenaient pas. C'est le cas de Sylvestre, l'ami de Yann, le cousin de Gaud, le dernier petit fils de la vieille grand-mère Yvonne. Les listes gravées des marins perdus en mer ou ailleurs ne cessent de s'allonger...  Cette lecture m'a beaucoup appris sur cette époque et la vie de ces marins... Dont certains ne voulaient tellement pas embarquer chaque année pour l'Islande qu'ils étaient soulés pour être montés bord sur des civières...

Et bien sûr, il y a la Bretagne, ces côtes déchiquetés et parfois battus par les flots et les vents, ses doux printemps, ses chemins bordés d'ajoncs, ses rites, ses traditions, ses coiffes, ses vieilles maisons de granit au sol de terre battue, ses chapelles et ces croix dressés aux pointes... Que de prières pour qu'ils reviennent sains et saufs.

Enfin et surtout, il y a Gaud et Yann, et cet amour trop longtemps refusé par l'un, trop longtemps espéré par l'autre, qui finira par être partagé et vécu, mais tard, tellement trop tard. Sublime et bouleversante histoire d'amour qui noue le coeur, au rythme des us et coutumes de l'époque, et de l'attente, l'attente, l'interminable attente. Et toujours, la mer qui tourmente les coeurs.

Dans ce magnifique et tragique roman d'un autre âge, Pierre Loti, lui-même marin au long cours, nous emmène autant dans la cale d'un navire, que sur les flots ou dans le tréfond du coeur et de l'âme humaine. Une histoire de mer nourricière mais dévorante. A (re) découvrir !

 

+ 2 points soit 20 au total, me voici "second maître" :)

 

Rédigé par Géraldine

Publié dans #Littérature française

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A
Je l'ai lu quand j'étais en vacances pas loin de Paimpol, j'ai vu la Croix des veuves et le cimetière de Ploubazlanec où sont notés le nom des bateaux et des marins perdus en mer lors des campagnes islandaises. J'ai beaucoup aimé aussi !
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T
J'aime bien cette édition "antédiluvienne"... Je tâcherai de dénicher ce bouquin d'occasion: je ne suis pas sûr de déjà l'avoir lu!<br /> (s) ta d loi du cine, "squatter" chez dasola
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M
Lu il y a si longtemps ! A relire, donc. Je l'ai, bien sûr, dans ma bibliothèque...
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V
Je l'ai lu il n'y a pas si longtemps et je l'ai vraiment apprécié, moi aussi ! Un beau classique !
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G
Jamais lu, ton coup de coeur donne envie de le découvrir.
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M
Je l'ai lu bien évidemment et deux fois dans ma vie mais voilà que ton enthousiasme me donne envie de le relire :) Je pense que c'est en effet le genre de classique qui ne prend pas une ride et nous apporte à chacune de nos lectures de nouvelles découvertes...
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F
On sent que cette lecture t'a grandement inspirée et ça me donne terriblement envie de découvrir cette écriture ciselée et fluide à la fois, qui "se sirote" ! Ça a l'air d'être quelque chose. Je situe mieux l'histoire aussi maintenant. Je pensais que ça se limitait à des histoires de pêche, mais c'est visiblement plus riche. Contente que Pierre Loti ait enfin fait son entrée au book trip en mer grâce à toi.<br /> (en passant, je t'avais compté 2 points de plus pour Sepulveda puisque les pays hors France, USA et Royaume-Uni comptent 2 points. Du coup tu es à 20 points et passée second-maître !;)
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G
Bonne nouvelle :) et avec les lectures que j'ai encore de prévues, je pense que je finirai maître ! Pas mal pour quelqu'un qui n'avait que 2 projets de lecture (PAL !!!) à l'origine !
P
J'ai sans doute lu ça quand j'étais à l'école, à une époque où je ne pouvais pas apprécier ce genre de littérature ! Tu me donnerais bien envie de le relire, même si je ne lis pas de classique habituellement.
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S
Je me suis noté d'écouter l'adaptation de France culture sans l'avoir encore fait. Une version audio devrait rendre le récit encore plus "photographique" pour moi !
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L
C’est amusant nous étions à Rochefort en espérant revoir la maison de Pierre Loti qui hélas n’ouvrira qu’en septembre… Pierre Loti était l’auteur préféré de ma grand-mère…
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K
Fichtre, le coup de coeur, carrément!
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I
Ton enthousiasme est communicatif ! J'ai pensé le lire lors d'un séjour près de Paimpol, pour finalement remettre ce projet à plus tard .. à retenir, donc.
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