WALLACE, de Colin NIEL
Publié le 8 Octobre 2025
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Roman - Editions du Rouergue - 336 pages - 21.80 €
Parution en août 2024
Mon pitch : Où l'on retrouve Mathurine, dix ans après Darwyne...
Elle vit toujours en Guyane, travaille pour la protection de l'enfance, et a maintenant un fils, Wallace, de presque neuf ans. Mais les relations se tendent avec lui, qui ne jure que par sa console vidéo alors qu'elle rêverait de l'emmener en forêt...
Une adolescente placée en famille d'accueil disparait, est retrouvée morte noyée aux abords forêt. Tiburce, son père inconsolable, raconte à Mathurine une étrange expérience en forêt, comme celle d'une présence invisible... Et si Darwyne était toujours vivant, s'il n'était pas décédé dans le glissement de terrain avec sa mère dix ans plus tôt, comme tout le monde l'affirme...
Tentation : Mon coup de coeur pour Darwyne (premier opus)
Fournisseur : La bib de St Lunaire
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Mon humble avis : Wallace est donc la suite de Darwyne... Si les deux romans peuvent se lire en one shot, je conseille tout de même vivement de les lire à la suite et dans le bon ordre, pour appréhender au mieux le personnage de Mathurine et connaître le passé et l'étrangeté si captivante de Darwyne.
Mathurine n'est plus enquêtrice, désormais, elle suit les enfants en familles d'accueil et gère également les rencontres avec les parents... Même si la relation avec son fils Wallace est plutôt fusionnelle, celui-ci est parfois jaloux de toute l'attention qu'elle porte à ses protégés placés. Cet aspect-là du roman nous entraîne dans la détresse sociale de la Guyane, où il y a défaut de soin et d'éducation à cause de la misère, de la drogue, ou encore, parce que suite à un décès, le parent veuf et seul n'arrive pas à gérer sa parentalité. Colin Niel dénonce aussi les manques de moyens cruels de l'Aide sociale à l'enfance, avec des familles d'accueil en trop petit nombre, surchargée, le personnel pas assez nombreux etc...
Mais avec Wallace, Colin Niel montre que personne n'est à l'abris de déraper, de faillir dans son rôle de parents, même dans les familles qui ne manquent de rien. Ainsi, c'est Mathurine qui va disparaitre des semaines durant, en laissant Wallace seul et il faudra une bonne dizaine de jour pour que les services sociaux s'en aperçoivent... Dans Wallace, Colin Niel dépeint ce qui peut se passer quand un enfant manque à un parent, mais aussi quand c'est un parent qui manque à un enfant. Des situations où chacun redécouvre l'amour immense qu'il éprouve pour l'absent... et les regrets...
Nous lecteurs savons très bien où est Mathurine... Elle est en forêt... Dans cette forêt enchanteresse, merveilleuse, ensorceleuse, dangereuse... Tiburce y est aussi, pour une autre raison. Mais pour nous, c'est un voyage au coeur de la forêt primaire aussi savoureux qu'inquiétant, qui, comme dans Darwyne, nous donne à entendre, voir, sentir, découvrir même l'invisible... On peut mettre du temps à lire cela si à chaque évocation d'une espèce animale, on demande à Google à quoi elle ressemble. C'est un véritable bestiaire qui m'était inconnu que j'ai découvert dans ces pages. Colin Niel nous emmène toujours à la frontière du réel et du mythe avec des scènes on ne peut plus fantasmagoriques.
Les chapitres alternent entre la solitude de Wallace chez lui, Tiburce qui traque en forêt la chose qu'il estime responsable de la mort de sa fille, et Mathurine qui s'enfonce toujours plus profondément dans cette même forêt, souvent accompagnée, parfois seule... A moins que ? Le doute peut toujours planer et chacun choisira son explication... Quoiqu'il en soit la tension monte, insidieuse... et ce roman nous dévore autant qu'on s'en régale. Colin Niel nous égare parfaitement entre repères quotidiens (appartement, école, bureau), et l'inconnu au tréfond de la forêt.
Ce tome est peut-être plus malaisant et plus dure que le précédent, tant le comportement de Mathurine peut paraître irresponsable.... On pourrait être tenté de la juger... Mais c'est là que Colin Niel nous dit : Personne n'est infaillible ni à l'abri d'une réaction irrationnelle. Et qu'il y a des moments ou l'amour n'y peut rien, peut-être... Que les enfants que l'on a ne deviennent pas forcément ceux dont on a rêvé, que l'on a idéalisé, et que cela peut-être culpabilisant pour eux. Qu'un enfant aime sa mère de façon inconditionnelle, même si l'inverse n'est pas forcément vrai... Et que notre animalité est toujours tapie en nous...
Un roman foisonnant très fort, envoûtant et sublime. Comme pour Darwyne, beaucoup plus proche du drame social d'enfance malmenée que du roman policier... Il n'empêche, je n'en n'ai pas fini avec Colin Niel !
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