Lectures, BD, cinéma, voyages, photos, chats, oiseaux, nature bref mon petit monde ! .................. " C'est le temps que tu as perdu pour ta rose qui fait ta rose si importante" (Le petit prince)
Avec Adèle Exarchopoulos, Jérôme Commandeur, Sandrine Kiberlain
Synopsis : Magalie est une star du web hors sol et sans morale qui gagne des fortunes en postant des contenus choc sur les réseaux. Après un accident grave survenu sur le tournage d'une de ses vidéos, Magalie s'isole à la montagne avec Patrick, son assistant personnel, pour faire un break. Une journaliste détenant une information sensible commence à lui faire du chantage… La vie de Magalie bascule.
Mon humble avis : Tout part d'un accident de piano, dont seule la deuxième partie du film dévoilera les circonstances et conséquences !
Premier film de ce réalisateur que je vois, et j'ai beaucoup aimé. Même si, c'est vrai, c'est space ! Mais ça fonctionne diablement. Les images envoient une impression surannée, comme un film de série B des années 80. L'accident de piano est un film complètement décalé, qui flirte avec le pastiche du film d'horreur, avec l'absurde, le tout sur un ton glacial et très détaché... Ce qui rend l'ensemble comique parce que cynique et grotesque. Mais cette farce, qui peut se regarder au premier degré comme au dixième, est bien réfléchie, comme le prouve les dialogues percutants. Avec peu de moyen et sans y aller par quatre chemins Dupieux prend pour cible deux contre médias : les influenceurs (ou créateur de contenu) du Web, et la presse. La premier, pour le néant qu'ils proposent (pour vous j'ai testé gnagnagna...) et la presse pour sa volonté à vouloir comprendre, et analyser ce néant. Bref, l'accident de Piano est un film sur la vacuité de notre époque, sur les artisans de ce vide qui est tant regardé et admiré qu'il génère un pognon de dingue à coup de likes et d'algorithmes.... Voilà ce que nous dit Dupieux... En 2025, ce qui compte c'est l'argent... et bien souvent, dans le divertissement et la "culture" via les réseaux sociaux, cette manne financière ne repose sur rien. Sans parler des fans et groupies qui vénèrent ces créateurs de contenue, donc ce vide.
L'exemple de Magalie (l'anti héroïne bien barrée, par une Adèle méconnaissable) est parlant. La caricature est poussée à son paroxysme, c'est féroce, drôle, c'est noir et très clair et lucide... dans les propos !
Bref, j'ai passé un très bon moment, et maintenant que j'ai découvert le cinéma de Dupieux, je compte bien rester à table !
Roman - Editions Albin Michel - 293 pages -22.90 €
Parution en janvier 2025
Mon pitch : A Dublin, un soir de pluie, deux hommes de la GNSB (nouvelle police secrète) sonnent chez les Stacks. Ils souhaitent s'entretenir avec Larry qui est absent. Ce dernier se rend au commissariat le lendemain... Et n'en reviendra jamais alors que le gouvernement déclare l'Etat d'urgence. C'est le début de l'enfer. Eilish Stacks se retrouve seule avec ses 4 enfants, dont le dernier nouveau-né. Jusqu'où devra-t-elle aller pour les protéger et les garder vivants dans ce chaos indescriptible fait de privations, de restrictions drastiques, de danger, de violence...
Tentation : La blogo
Fournisseur : La bib de St Lunaire
Mon humble avis : Roman ultra primé, dont du fameux Booker Prize... Quand une démocratie bascule dans la dictature.
Le chant du prophète est une lecture terrible, anxiogène, étouffante et pourtant prenante. On est ahuri et abasourdi de cette plongée en "absurdie". Mais une absurdité réaliste, vraie, certainement existante. Cette histoire est une dystopie car elle se déroule en Irlande, pays démocratique et en paix. Mais il y a bien des pays au monde où cette dystopie n'est pas fiction : pays en guerre contre un ennemie extérieur, pays en guerre civile, pays totalitaires etc... Je pense qu'il existe des Eilish Stacks dans toutes ces contrées. Eilish Stacks, une mère courage que nous ne quittons pas un instant durant ces presque 300 pages.
Cela commence par des disparitions (Notamment celle de Larry, enseignant et syndicaliste), des licenciements, des arrestations, l'Etat d'urgence... Et cela va jusqu'aux bombardements aériens. Il y a l'armée régulière, les rebelles, les milices. On ne sait plus qui est l'ennemi puisque chacun finit par se comporter de la même manière que celui qu'il combat : que ce soit dans la façon brutale d'être ou dans les décrets absurdes qui paraissent chaque jour. Plus rien n'a de sens. Certains habitants fuient la ville et le pays pendant qu'il en est encore temps. Eilish veut rester, au début pour être là au retour de son mari. De plus, à l'autre bout de la ville, son père s'enfonce dans la maladie d'Alzheimer. Puis... je vous laisse découvrir la suite... C'est donc cette résistance, qui page après page progresse vers la survie, et uniquement la survie, que Paul Lynch nous décrit ici. Les personnages sont très attachants et admirables pour certains... Eilish est de ces femmes que l'on n'oublie pas, tout comme sa fille Molly qui à peine adolescente, n'a d'autre choix que de devenir adulte.
Oh c'est parfaitement fait, avec des mots précis, Lynch nous emmène dans cette désespérance glaçante que seul l'instinct de survie et de protection empêche de devenir folie. On est dans le coeur d'Eilish, dans ses peurs, dans ses mensonges, dans ses espoirs, dans sa rage, dans son courage, dans ses mains, dans ses veines, dans ses pieds, dans ses yeux, dans ses oreilles, dans sa tête. Sous bien des aspects, on ne peut être qu'admiratifs du talent de Paul Lynch pour décrire cette spirale cauchemardesque et nous la faire ressentir, voir vivre. Avec en parallèle, la maladie d'Alzheimer de Simon. Il y a de la maestria dans ces pages.
Et pourtant, j'émets deux bémols qui ne relèvent pas du détail...
Etait-il nécessaire d'aller si profondément et si longtemps dans l'horreur ? Eilish, et à travers elle les lecteurs, ne pouvaient-ils pas être épargnés de certaines épreuves sans que l'objectif et la force de ce roman ne soient remis en question ? A la fin, j'ai eu une impression de surenchère (je ne peux en dire plus sous peine de spoiler)... Certes réaliste, mais est-ce indispensable ?
Enfin et surtout, le style rédactionnel... Aucun espace ni aération dans le texte, pas d'alinéas, pas de paragraphe, pas de "tirets ouvrez les guillemets" pour annoncer un dialogue. Tout est écrit au kilomètre avec de temps en temps, un saut de ligne. Cela ajoute donc à l'aspect étouffant du sujet. C'est peut-être voulu mais ce n'est pas vraiment agréable à lire et même parfois difficile. Il faut se concentrer notamment au moment des dialogues pour savoir qui parle, et se fier aux indices d'accords et de conjugaison pour deviner parfois. Bref, cette absence de mise en page est très déstabilisante d'entrée de jeu, même si l'on finit par s'habituer à peu près, la sensation d'asphyxie demeure.
Aussi, malgré les manifestes grandeur et indélébilité de l'oeuvre, je suis bien incapable de vous dire si je vous en conseille ou non la lecture.
"L'histoire, c'est le registre silencieux de ceux qui n'ont pas pu partir, de tous ceux qui n'ont jamais eu le choix, comment partir quand on n'a nulle part où aller, on ne va nulle part quand nos enfants ne peuvent pas obtenir de passeport, on ne va nulle part quand on a les pieds enracinés dans le sol et qu'il les faudrait pour pouvoir partir."
Mon pitch : Ignorés du reste du monde, deux pays s'affrontèrent trois mois durant l'hiver 1939 - 1943. Un pays minuscule contre un géant... La Finlande contre la Russie. Ce fut la Guerre d'Hiver qui bien que localisée, modifia le cours de l'Histoire de toute l'Europe. Olivier Norek nous raconte ces 103 jours meurtriers et dresse le portrait d'un soldat devenu légende. Simo le sniper Finlandais que tout le monde surnomma alors "La mort blanche".
Tentation : Roman incontournable de la Rentrée Littéraire 2024
Fournisseur : La bib de Dinard
Mon humble avis : Je pourrais élever ce roman au rang de coup de coeur tant je n'ai rien à lui reprocher, si ce n'est un peu sa longueur (mais celle-ci est tout à fait justifiée). Mais avec les Guerriers de l'hiver, je suis loin de ma zone de confort et les romans de guerre ne sont pas de ceux vers lesquels je me précipite habituellement.
Il n'empêche, je suis en admiration total pour le travail de recherches et de rédaction réalisé par Olivier Norek, qui remercie chaleureusement en fin de livre toutes celles et tous ceux qui l'ont aidé dans cette entreprise titanesque.
Olivier Norek, ancien policier, nous a accoutumés à des polars/thrillers géniaux, et voilà qu'il bascule avec un talent et un succès inouï dans le roman historique. Tous les faits d'arme cités dans ces pages sont réels.
Je ne retiendrai pas tout et certains passages liés aux stratégies militaires ou aux discours des hauts gradés ou politiques me sont un peu passés au-dessus. Mais sur le front, avec Simo et les autres, j'y étais, ça c'est sûr. Et j'ai appris beaucoup. Déjà l'existence de cette guerre dont je n'avais jamais entendu parler. Une fois de plus, la Russie pensait plier cette guerre en moins de 10 jours... Sauf que les Russes n'avaient aucune idée des conditions du terrain et donc n'étaient pas prêts et se sont empêtrés sur place et dans le mensonge en Russie. La honte pour Staline dont la réserve inouïe de soldat, envoyés comme chair à canon, ne vient pas à bout d'une minuscule armée. Staline a oublié qu'un soldat qui défend son pays et sa liberté en vaut dix. (comme en Ukraine) Et surtout, Staline a oublié d'équiper correctement ces hommes... Par des températures variant de moins 30 degrés à moins 50 degrés, dans des paysages blancs de neiges, les soldats russes sont arrivés vêtus de vert, et pour la plupart, en uniforme estival... Les Russes ont des tanks, mais les Finlandais ont des bottes qui tiennent chaud...
Norek nous emmène autant au coeur de cette guerre infernale qu'au coeur de ces hommes qui se sont battus. De ces hommes qui ont dû tuer par devoir. On doit tuer, puis on peut tuer, puis on veut tuer... Les conséquences et conditions psychologiques de ce conflit sont extrêmement bien mis en mots par l'auteur. Nous sommes aux cotés de Simo, le sniper, avec qui l'on retient notre respiration. On avale de la neige pour que notre respiration ne nous trahisse pas... D'ailleurs on lit certains passages en apnée.
Captivant, superbement menée mais aussi très sombre, cette page de l'Histoire est à connaître et donc ce livre à lire, que l'on soit friand ou pas de ce genre littéraire.
Synopsis :Aujourd’hui, en 2025, une trentaine de personnes issues d’une même famille apprennent qu’ils vont recevoir en héritage une maison abandonnée depuis des années. Quatre d'entre eux, Seb, Abdel, Céline et Guy sont chargés d’en faire l'état des lieux. Ces lointains "cousins" vont alors découvrir des trésors cachés dans cette vieille maison. Ils vont se retrouver sur les traces d'une mystérieuse Adèle qui a quitté sa Normandie natale, à 20 ans. Cette Adèle se retrouve à Paris en 1895, au moment où cette ville est en pleine révolution industrielle et culturelle. Pour les quatre cousins, ce voyage introspectif dans leur généalogie va leur faire découvrir ce moment si particulier de la fin du XIXe siècle où la photographie s'inventait et l’impressionnisme naissait. Ce face à face entre les deux époques 2025 et 1895 remettra en question leur présent et leurs idéaux et racontera le sens de : La venue de l’avenir.
Mon humble avis : J'ai fini, tardivement, par voir le nouveau film de Cédric Klapisch, réalisateur que j'aime énormément. Mais là, grande déception. Pourtant, sur le papier, l'histoire pouvait être alléchante, et originale. Mais une fois dans la salle obscure, Dieu que le temps m'a paru long. Et même si l'on est au cinéma, les improbabilités m'ont sauté aux yeux.
Pourtant, cela démarrait bien avec une scène d'ouverture franchement drôle dans son aspect dérision de notre époque. En cours de film, quelques passages sympas sur l'art photographique et la présence douce et lumineuse de la chanteuse Pomme. Vers la fin, une scène très émouvante de départ à la retraite d'un professeur de Français (le toujours discrètement génial Zinédine Soualem). A part cela, et bien voici :
- Vincent Macaigne fait du Vincent Macaigne. Certes, il le fait bien, comme d'habitude, mais ce n'est plus surprenant du tout. Il serait temps que les réalisateurs l'imaginent dans d'autres rôles.
- Suzanne Lindon a encore de sacrés progrès à faire en expression émotionnelle. Elle ne m'a pas touchée.
- Paul Kirshner (qui joue Anatole) n'est guère plus expressif et la fausse moustache qu'il porte fait tellement postiche que l'on ne voit que ça.
- Avec le notaire et cie, quatre membres d'une famille entrent dans une masure qui n'a pas été ouverte depuis les années 40... Certes, les tapisseries sont d'un autre âge et en lambeaux mais sinon tout va bien... Rien ne s'effondre, rien n'est moisi, pas de rats, pas de toiles d'araignées etc...
- La moitié de du film se déroule à Paris en 1895... Et là, les clichés s'accumulent, les décors font vraiment carton pâtes, même les figurants semblent mal dirigés tant leur présence ne parait pas naturelle. On est plus dans une succession de tableau que dans un film fluide. Certaines expressions usitées par les personnages, des dialogues paraissent tout à fait anachroniques.
Bref, quand je m'ennuie, je vois tous les défauts, si ça se trouve, peut-être même que j'en invente.
Seuls Julia Piaton (j'adore), la chanteuse Pomme, Abraham Wepler et Zinedine Soualem tirent leur épingle du jeu et sauvent, à mon humble avis, ce film d'un marasme absolu.
Avec Baptiste Lecaplain, Alison Wheeler, Lyes Salem
Synopsis :Comédien en perte de vitesse, Stéphane débarque avec sa troupe au Festival d’Avignon pour jouer une pièce de boulevard. Il y recroise Fanny, une comédienne de renom, et tombe sous son charme. Profitant d’un quiproquo pour se rapprocher d’elle, Stéphane s’enfonce dans un mensonge qu’il va devoir faire durer le temps du festival…mais qui va très vite le dépasser !
Mon humble avis : Comme en Mai, j'ai visité la ville d'Avignon, évidemment, je ne pouvais que voir ce film. Déjà, pour le plaisir de revoir rues, places et ruelles où je me suis baladée, même si le contexte est un peu différent : nous sommes ici en plein festival d'Avignon, donc les rues sont pleines, l'animation de la ville est à son paroxysme. Et c'est bien sympa le temps d'une séance, de se retrouver sous ce soleil, d'apercevoir des artistes de rue, mais aussi, de bénéficier de superbes vues aériennes. Bon, ça c'est pour le visuel !
Avignon est une douce comédie romantique, rafraichissante malgré le soleil de plomb qui règne sur le Palais des Papes. L'histoire est un peu diesel. Au début, j'ai craint un côté un peu trop limite et gags et en fait pas du tout. Le scénario gagne en finesse tout au long du film et s'achève sur une fin des plus inattendues.
Avignon est aussi porteur de messages... Il est question de la précarité du monde théâtrale, du métier de comédien, du flux tendu financier permanent qui menace l'existence ou la disparition d'une oeuvre. On y voit aussi la passion qui régit la vie d'acteur non connu du grand public. Mais surtout, et c'est là tout le sel de l'histoire qui dénonce les perpétuelles barrières d'un genre par rapport à un autre. Dans ce film, les comédiens qui interprètent des classiques regardent de haut avec un mépris non dissimulé leurs "confrères" qui joue dans des comédies de boulevard. Comme si un genre d'art était supérieur à l'autre. Et le plus souvent, ce mépris émane de personnes qui ne connaissent que le genre qu'il défende et représente. Sans penser dire que le public a le droit de choisir sans être forcément débile pour son choix, que le public peut aimer les deux, que le public peut tantôt aimer assister à une représentation du Cid et le lendemain, se diriger vers le divertissement total avec une bonne comédie, qui détend les zygomatiques... Sans pour autant remettre en cause le talents des comédiens. Cette frontière qui existe dans tous les styles d'art m'exaspère. Elle est aussi présente en musique par exemple ou en littérature. Les livres qui se vendent le plus en France sont souvent bien dénigrés par ceux qui ne vont lire que de "la grande, ou de la vraie littérature". Sans se dire qu'il y a de la place pour tout le monde et qu'il en faut pour tous les goûts. Personnellement, je fais toujours attention à dire "je n'aime pas" et j'évite de dire "c'est nul".
Les personnages du film sont pour la plupart représentatifs de ce fameux débats qualitatifs mais au niveau humain. Une fois qu'on apprend à les connaitre, une fois qu'ils ont les moyens d'exprimer ce qu'il y a de meilleurs en eux, ils deviennent très attachants, profondément humain, et courageux quelque part.
Le sujet : "Aujourd'hui, l'heure des prédateurs a sonné et partout les choses évoluent d'une telle façon que tout ce qui doit être réglé le sera par le feu et par l'épée". Ce petit livre est le récit de cette conquête, par images, plutôt que par concepts, dans le but de saisir le souffle d'un monde, au moment où il sombre dans l'abîme, et l'emprise glacée d'un autre, qui prend sa place." Giuliano da Empoli nous guide de l'autre côté du miroir, là où le pouvoir s'acquiert par des actions irréfléchies et tapageuses, où des autocrates décomplexés sont à l'affût du maximum de chaos, où les seigneurs de la tech semblent déjà habiter un autre monde, où l'IA s'avère incontrôlable...
Fournisseur : Prêt par une dame rencontrée lors de l'inauguration d'une nouvelle librairie !
Mon humble avis : J'avais tellement aimé "Le mage du Kremlin", qui m'avait aidé à mieux appréhender la mentalité russe, Poutine et l'actualité qui en découle, que j'ai voulu lire ce nouvel ouvrage de Giulino Da Empoli. Si "Le mage" était un roman, "L'heure de prédateurs" est un essai... Et les essais je n'en lis quasiment jamais, ne trouvant pas assez d'accroche pour être captivée et tourner les pages sans m'en rendre compte...
Voilà donc un texte bien dense et exigeant et bien copieux. Mais la plume alerte et agréable l'auteur, l'aspect "vulgarisation" en font un livre très intéressant, passionnant et relativement facile à suivre... Même si je ne suis pas sûre d'avoir tout intégré et de tout retenir à l'avenir, j'ai l'idée générale avec des exemples précis, je me coucherai donc moins bête et hélas, guère plus optimiste quant à l'avenir de notre civilisation.
Da Empoli s'appuie sur moults documents consultés mais surtout son expérience de conseiller politique qui lui fait fréquenter les hautes stratosphères. Car ce journaliste, écrivain et prof à Science Po Paris traîne aussi ses baskets dans les couloirs de l'ONU etc... Il était donc présent dans nombre de scène qu'il décrit dans ces pages.
Les prédateurs... Ce sont les créateurs, et les dirigeants autocrates des plateformes, les fameux Gafas, les Elon Musk et consorts, les dieux de la technologie, des bases de données, de l'IA (cet accélérateur de pouvoir), qui s'immiscent partout et prennent le pouvoir par leur influence... La tech américaine. C'est une nouvelle aire de la politique, où seule compte la fin, pas les moyens. Ces Etats Nations qui croissent sans règles alors que l'équilibre du monde se base sur quelques règles communes.
Dans ce livre, on comprend que la première élection de Barak Obama est bien due au discours politique. Sa réélection est obtenue grâce au numérique et à la gigantesque base de données créée à l'époque par d'Ex Google and co...
On comprend aussi une des raisons du retour de Trump à la Maison Blanche... Les démocrates sont un parti d'avocats et de règles... Les républicains sont composés d'autocrates, d'investisseurs etc... Et deviennent sans règles, comme notre époque tend à l'être.
On comprend aussi, par exemple, que depuis Trotski, révolutions et coups d'état n'ont plus besoin d'une armée de rebelles pour parvenir à leur fin, mais juste d'une poignée d'hommes parfaitement organisée et dirigée.
On réalise aussi, avec effroi, que nos grands-parents avaient cent fois moins d'informations que nous, mais qu'ils pouvaient prédire leur avenir. Alors que maintenant, demain est incertain et après-demain peut ne plus ressemble du tout à hier... Tant tout va très très vite chez les prédateurs.
Da Empoli explique aussi pourquoi certains temps sont plus paisibles et d'autres bien plus guerrières... Parce que selon les périodes, les armes défensives coûtent plus chères que les armes offensives... Donc plutôt que devoir peut-être se défendre, déclarons la guerre. C'est un peu l'idée, avec mes mots. Egalement, pour ne pas imploser, mieux vaut exporter et déplacer le chaos pressenti.
Bon, évidemment, je n'ai mis ici que les exemples les plus limpides à mes yeux. Mais ce livre est une mine d'informations, Juliano Da Empoli détricote vraiment bien notre époque pour nous la rendre plus lisible, faute de nous la rendre plus agréable et optimiste. Et encore, ce n'est que le début, personne en fait, ne sait où l'on va, ni même les prédateurs, créateurs de chaos... L'IA bientôt décidera pour nous et ceux qui feraient leurs propres choix devront s'en défendre.
Une excellente analyse géopolitique d'aujourd'hui et des perspectives de demain. Et qui souligne parfaitement l'importance des enjeux, même si, dans notre petit quotidien, on n'en n'est pas toujours conscients. Des réponses donc, mais aussi beaucoup de questions qui restent sans, évidemment...
Des extraits et citations, qui vous donneront le ton !
le chaos n'est plus l arme des rebelles, mais le sceau des dominants.
Tant que la compétition politique se déroulait dans le monde réel, les coutumes et les règles de chaque pays en déterminaient les limites mais quand il déménage en ligne, le débat se convertit en foire d'empoigne où tout est permis et où les seules règles sont celles des plateformes.
(au sujet de l’IA)
Les technologues ne voient pas où est le problème. Puisqu’ils ne s’intéressent ni à l’histoire ni à la philosophie, ils ne se rendent pas compte que leur proposition équivaut à un retour à l’époque d’avant les Lumières, à un monde magique, incompréhensible, régi par l’IA que l’on priera comme les dieux de l’Antiquité.
Partout, le principe reste le même. Trois opérations simples : identifier les sujets chauds, les fractures qui divisent l’opinion publique ; pousser, sur chacun de ces fronts, les positions les plus extrêmes et les faire s’affronter ; projeter l’affrontement sur l’ensemble du public, afin de surchauffer de plus en plus l’atmosphère.
Trump n'est au fond que l'énième illustration de l'un des principes immuables de la politique, que n'importe qui peut constater : il n'y a pratiquement aucune relation entre la puissance intellectuelle et l'intelligence politique. Le monde est rempli de personnes très intelligentes, même parmi les spécialistes, les politologues et les experts, qui ne comprennent rien à la politique, alors qu'un analphabète fonctionnel comme Trump peut atteindre une forme de génie dans sa capacité à résonner avec l'esprit du temps.
Au cours des trois dernières décennies, les responsables politiques se sont comportés face aux conquistadors de la tech exactement comme les Aztèques du XVIe siècle. Confrontés à la foudre et au tonnerre d'internet, des réseaux sociaux et de l'IA, ils se sont soumis dans l'espoir qu'un peu de poussière de fée rejaillirait sur eux.
Roman - Editions Audiolib - 12h56 d'écoute - 23.45 €
Parution d'origine chez Phébus en 2021
Mon pitch : Deux trajectoires de vie différentes, liées à un choix, plus ou moins consenti. Celles de deux jeunes filles, tout juste sorties de l'adolescence. L'une d'un milieu modeste, l'autre d'origine sociale plus élevée. Elles ne se connaissent pas, mais toutes les deux, tombent enceintes en même temps. L'une garde l'enfant, l'autre non.
On suit leur destinée sur presque deux décennies.
Tentation : Mon grand coup de coeur pour "dans la forêt" de la même autrice.
Fournisseur : La bib de Dinard
Mon humble avis : Roman écrit en 2004, mais qui prend racine bien plus tôt, et paru en France qu'en 2021.
Certes, "apaiser nos tempêtes" est un peu moins fort et original que dans la forêt. Il n'empêche, c'est une audiolecture très agréable (grâce à une interprétation dynamique), un texte très prenant, et non dénué de puissance aussi émotionnelle qu'universelle. J'ai adoré cette histoire et suivi avec forte empathie ces deux femmes dans leurs joies et leurs peines, leurs réussites et leurs galères, leurs interrogations et doutes, leurs certitudes, leurs déceptions, leurs peurs, leur courage, leur chance, leur malchance aussi.... Cette histoire a un côté initiatique, dans le sens où Anna et Cerise apprennent à devenir femmes et mères, mais dans des conditions différentes et avec un peu de décalage dans le temps, malgré un point de départ commun. Ce qui m'empêche d'ériger Apaiser nos tempêtes au rang de coup de coeur, c'est sa longueur.... Oui, à la fin, il m'a paru que ce roman n'en finissait pas, que moults détails étaient superflus, malgré la présence de scènes très fortes jusqu'à la toute dernière page.
Jean Hegland livre ici un roman assez sociologique qui traite de la féminité, de la maternité, qu'elle soit voulue ou non, en monoparentale ou en couple. Quoiqu'il en soit, qu'il est dur d'être mère, d'autant plus dans une société de plus en plus violente, où la charge mentale croît au fil des évolutions d'une société qui ne fait pas de cadeau, et qui stigmatise les plus fragiles... Tout cela est traité avec autant de justesse que de finesse par Jean Hegland, ces deux héroïnes sont des personnages extrêmement aboutis et attachants. On devine qu'elles finiront par se rencontrer, la question est quand, et dans quelles circonstances. On devine aussi que cette rencontre les changera à jamais, même si ses effets semblent, à premières vus, assez ténus.
Il est aussi question de l'art photographique, puisqu'Anna est photographe... Ceci n'était pas pour me déplaire. A préciser également, cette version audio offre une préface très intéressante de l'autrice elle-même, qui y dévoile les origines de ce roman et sa note d'intention.
Un roman qui nous dit que notre vie est la somme de nos choix, de nos rencontres... mais aussi, de nos chances et de nos malchances. Quoiqu'il en soit, un point de départ commun ne mène pas toujours au même point d'arrivée. Sublime, poignant, mais un peu trop long à mon goût.
Mon pitch : La confession d'un homme, d'un père. Avant, pendant et juste après une marche blanche. Celle en hommage d'Hugo, son fils de 14 ans, qui s'est donné la mort un mois plus tôt... Après des semaines et des semaines de brimades, de moqueries, de coups, d'insultes, de menaces, de guet-apens, d'intimidations, de racket, bref d'enfer au collège... Hugo, une victime de plus du harcèlement scolaire...
Tentation : Le sujet et la plume de Philippe Besson
Fournisseur : La bib de St Lunaire
Mon humble avis : Un roman qui se lit en apnée, qui brise le coeur, noue la gorge.... alors que la colère monte en nous.... Vous parler de mon fils est un roman, juste sans doute parce que ses personnages sont fictifs. Mais la réalité décrite y est bien réelle, on le sait, les médias en parlent régulièrement : le harcèlement scolaire.
J'en fus aussi victime au collège, sur une année, mais dans des proportions tellement moindres... Et pourtant, quarante ans après, je n'ai rien oublié. Pour moi, ça c'était limité aux moqueries en publiques, au verbal... Et quand je rentrais chez moi, cela cessait car point de réseaux sociaux à l'époque.
Ce n'est pas un livre qu'on adore, parce qu'on aimerait tellement lire autre chose quelque part, mais parce qu'il est nécessaire. Il devrait être lu par tous : membres de l'Education Nationale, du gouvernement, parents, frères, soeurs, oncles, tantes... Pour pouvoir peut-être un jour déceler un signe, une alerte qu'un jeune est en danger parce qu'harcelé. Hélas, je crains que le genre d'énergumènes capables d'infliger autant d'ignominie à un de leurs camarades de classe ne trainent pas beaucoup dans les librairies, et encore moins dans le rayon où l'on trouve cet ouvrage.
Philippe Besson nous accroche dans les pensées de ce père brisé, grâce à sa plume toujours juste et implacable, sa sobriété, son analyse parfaite des faits : l'engrenage, ses conséquences, l'aveuglement puis l'impuissance des parents, l'inertie de l'institution scolaire, de l'Etat, l'aveuglement des parents, le silence de la victime, le déni des parents des coupables, l'effet de masse au collège, le désastre des réseaux sociaux, l'impunité, les délais ahurissants de toute démarche, l'absence totale d'empathie de ces deux gamins qui ne regrettent rien, n'ont aucune conscience des conséquences de leurs actes..."C'était juste pour se marrer"... en gros...
On sent vraiment la spirale infernale s'installer... Si les parents ne font rien, comme les supplies Hugo une fois qu'il a déversé son désespoir, la situation ne s'arrangera pas. Si les parents agissent, elle risque d'empirer... Voilà où en est notre société décadente en 2025. Deux sales gosses de 14 ans tiennent tout un système en respect, et mettent une famille à genoux.... En 2025, le doute profite bien plus aux présumés coupables qu'à la victime. L'institution scolaire se cache derrière le "Pas de vague" et respecte à la lettre une soi-disant procédure comme s'il s'agissait ici d'une simple dispute entre adolescent. C'est consternant. L'antre de l'Education nationale n'est plus en mesure de protéger les enfants, ni même ses professeurs... Mais partout, l'enfant est devenu roi... C'est tout cela que nous dit ici Philippe Besson, mais bien plus encore : le sentiment de culpabilité des parents d'Hugo, leur douleur, leur peine, leur colère, leur haine, leur vie à jamais anéantie à cause de deux petits cons et d'une institution qui n'est pas su voir, entendre, écouter, protéger.
Cette tristesse, cette colère, cette haine nous accompagnent tout au long de cette lecture bouleversante et éprouvante, et deviennent nôtre.
Un sujet délicat, mais tellement actuel, mené par une main de maître. A lire, à partager, et surtout, à méditer... pour que des solutions efficaces face à ce fléau social voient le jour... et que cesse cette impunité.
Synopsis : Baptiste, imitateur de talent, ne parvient pas à vivre de son art. Un jour, il est approché par Pierre Chozène, romancier célèbre mais discret, constamment dérangé par les appels incessants de son éditeur, sa fille, son ex-femme... Pierre, qui a besoin de calme pour écrire son texte le plus ambitieux, propose alors à Baptiste de devenir son ‘répondeur’ en se faisant passer pour lui au téléphone… Peu à peu, celui-ci ne se contente pas d’imiter l’écrivain : il développe son personnage !
Mon humble avis : Si j'ai voulu voir ce film en urgence entre mon retour de vacances et un nouveau départ de quelques jours, cette fois-ci pour des funérailles, c'est parce que j'ai lu et adoré le livre éponyme dont il est l'adaptation. Pour retrouver ma chronique du roman de Luc Blanvillain, c'est ICI.
Si l'idée de départ peut paraître farfelue, le film n'en n'est rien et ne part jamais dans le déjanté ou l'ubuesque. Tout sonne en fait très juste, le dosage est délicat et parfait, même si évidemment les situations cocasses où l'affaire pourrait glisser ne manquent pas et nous amusent bien.
Un film très humain et une histoire qui dit beaucoup sur nous autres bipèdes... Depuis le parasitage du téléphone portable dans nos vies, jusqu'aux droits ou devoirs que nous avons de nous immiscer dans la vie des autres, pour leur bien évidemment ! Il est aussi bien sûr de confiance et de son non abus, puisque mine de rien, Chozène donne son téléphone et donc toute sa vie à Baptiste. Et oui, maintenant, toute notre vie est dans un téléphone. Baptiste en abusera-t-il ou pas ? Et bien sûr, il y a le gros sujet principal, le mensonge... Qui parfois, arrange bien tout le monde, même le bonheur quand ses "victimes" ont du mal à lui laisser une place.
Cette comédie douce et bienveillante est avant tout une étude des moeurs, des liens familiaux et franchement, il fait du bien. D'autant que son casting est aux petits oignons. Podalydès, on sait de quoi il est capable, mais la grande surprise, voire la grande découverte pour moi est Salif Cissé ! Au-delà de personnage très attachant qu'il a su créer, il y a aussi derrière un formidable travail sur la voix et la gestuelle... Pour cela, son coach a été Michael Gregorio, rien que ça, excusez du peu !!!
A voir, et pendant la séance, n'oubliez pas de mettre votre portable sur le mode répondeur !